Avant la révolution industrielle, la technique des ponts était restée ce qu'elle avait été pendant des siècles : ponts en bois, ponts de bateaux, ponts en pierre, ces derniers seuls, solides et durables, au prix de travaux difficiles pour l'enrochage des piles. Au XIXe siècle apparaissent de nouveaux types de ponts, les uns métalliques, les autres suspendus, tous deux originaires du Royaume-Uni. Le premier pont métallique fut lancé sur la Severn, en Angleterre, par Wilkinson et Derby, en 1779, et en France la première réalisation de cet ordre fut le pont des Arts, à Paris. Les ponts suspendus, moins onéreux et susceptibles d'une plus longue portée, font l'objet d'une grande vogue dans la première moitié du XIXe siècle : celui lancé par Seguin sur la Seine, à La Roche-Guyon, fut le prototype du genre, bientôt suivi par ceux de Tournon (1823), de Langon (1828)... C'est à ce type du pont suspendu qu'appartient celui de Brooklyn, sur l'East River, inauguré en 1883. Jusqu'alors Manhattan avait été complètement isolé, accessible seulement par bac, soit de Brooklyn, soit de Queens, soit de Staten Island. Ce pont fut conçu par deux ingénieurs d'origine allemande, John A. Roebling et son fils, Washington. Le tablier est suspendu par quatre séries de câbles à deux piliers de granit édifiés dans le style néo-gothique, très en vogue alors en Allemagne et aux Etats-Unis, et mesure un peu plus de 200 m de long. Du fait de ces dimensions, il fut considéré comme une grande prouesse technique, d'autant plus qu'il avait une triple utilisation. Au centre, se trouvait une« promenade » pour piétons qui venaient admirer la vue magnifique sur New York (dessin du centre). De part et d'autre, était installé un tramway électrique, qui recevait son énergie d'une usine électrique installée au pied du pont, côté New York (dessin n° 4). Aux deux extrémités courait une route pour les chariots, comme le montrent les deux dessins du bas. Ce pont devint rapidement populaire, s'intégra dans le folklore de la ville et inspira de nombreuses opérettes ou chansons. Scientific American, New York, 26 mai 1883, première page. Bibliothèque nationale, Imprimés. Photo Holzapfel - Documentation française. |